Vendredi 29 novembre 2019 à 14h
Quelques retours des élèves et enseignant.e.s :
J’ai été particulièrement touchée par le texte d’Hélène Cixous que vous avez cité (tiré de « Le rire de la Méduse et autres ironies » – éd. Galilée, 2010). À mesure qu’on avance en âge, qu’on prend un peu d’importance en tant que femme, il persiste, ce sentiment de ne pas être légitime, d’avoir l’impression de s’imposer quand on prend la parole.
Peut-être pourriez-vous insister plus sur l’homme faible, passif, tel qu’il transparaît dans le dernier poème érotique (de Mireille Sorgue) : oui la femme peut être forte, et oui l’homme peut aussi s’accorder cette faiblesse-là, et se détacher de tous ces stéréotypes qui pèsent sur lui.
Un enseignant de philo :
Votre spectacle est d’une force étourdissante qui me laisse un peu muet. Vous rendez publique votre intériorité, et vous montrez à quel point c’est un enjeu, une conquête, au cœur de notre vie commune, que de définir qui peut parler, qui peut se faire entendre, en ayant l’assurance pour cela de ne pas être indécent. Vous posez cette question d’une façon bouleversante.
Une enseignante de lettres :
Il y a deux ans nous avons vu avec des classes une adaptation de « L’homme semence », de Violette Aillaud, et plusieurs garçons se sont sentis heurtés par cette sensualité exprimée par une femme à l’égard d’un homme. Ils ne pouvaient pas imaginer qu’une femme puisse avoir un désir, ni que des femmes puissent considérer un homme comme une semence, comme une sorte de matrice pour repeupler un village, alors que le contraire – les femmes comme objets de désir et comme matrices – leur semblait normal.
Après le conte, un garçon a exprimé qu’il se sentait atteint dans sa « stature » d’homme, et que les revendications féminines le mettaient en situation de fragilité. Vous parliez tout à l’heure du fait de pouvoir prendre la parole et d’être entendu. Je crois qu’il est important d’avoir un public d’hommes et de femmes, de garçons et de filles, capable d’entendre ce qui est dit. Ce jour-là, les élèves disaient qu’ils n’avaient pas été en mesure d’entendre le propos. Après réflexion, ils estimaient que cela mettait leur virilité en question, et cette fragilité de l’homme, ils n’étaient pas prêts à l’assumer. C’est dommage que le public aujourd’hui soit si féminin – « donc » je l’espère pour la plupart gagné à la cause féminine -.
Un élève :
Pensez vous que récemment le féminisme est devenu quelque chose de commercial ?
Une autre enseignante de lettres :
C’est très troublant d’entendre un homme dire ça. En ce moment j’ai l’impression qu’enfin des hommes commencent à entendre et à comprendre un peu de ce qui pour nous est une souffrance. Finalement à chaque fois qu’une souffrance est reconnue, entendue par « celui qui (a) fait souffrir », cela soulage. Quand il y a eu souffrance, c’est essentiel que l’auteur la reconnaisse. Ça fait du bien d’écouter cette reconnaissance de notre empêchement de parler. C’est un bon chemin, un bon début, je me sens plus en confiance, ça me donne de l’espoir.
Représentation des Silencieuses au Lycée Roumanille (NYONS – Drôme) devant des classes de Premières-Terminales littéraires et humanités.
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